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Valentin Brunner, la passion du bois

22 avril 2023

Publié le :

Né il y a 25 ans à Saint-Julien-en-Genevois à la frontière franco-genevoise, Valentin Brunner a grandi entre la Suisse et la France, deux pays dont il dispose de la nationalité. Malentendant depuis son plus jeune âge, il vit désormais à Lausanne où il exerce son métier de passion : charpentier.   Depuis quand êtes-vous malentendant ? En fait, on n’a jamais trouvé la cause exacte. Il semble que j’entendais bien à la naissance, mais au fil des années, mes parents se sont rendu compte que quelque chose n’allait pas, même si les médecins tendaient à ne pas les croire. Finalement des tests chez l’ORL ont fini par confirmer une perte d’audition d’environ 50% à chaque oreille.  Je suis le seul malentendant dans ma famille, en dehors de mon père qui lui, l’est devenu très tard, vers l’âge de 35 ans. Êtes-vous appareillé ? Oui depuis l’âge de 6 ans et des deux côtés. La bonne nouvelle c’est que la situation est stable et que mon audition ne s’est jamais détériorée depuis. Comment s’est déroulé votre scolarité, avec ce handicap auditif ?   J’ai commencé ma scolarité à l’école publique en France, et cela ne se passait pas très bien, probablement en raison de mes problèmes auditifs… Puis mes parents m’ont inscrit à l’école Steiner à Genève, et cela a tout changé car j’ai été accueilli à bras ouverts par deux camarades extraordinaires, avec lesquels je suis toujours ami. Avec l’appareillage et le soutien d’orthophonistes, tout s’est très bien passé. Vous aviez obtenu de bons résultats scolaires ? Disons, avec des hauts et des bas. En langues, c’était difficile, et je pense que mon audition a joué un rôle. Par contre en géométrie, dans les matières artistiques ou manuelles, dans le sport aussi, j’étais très au-dessus de la moyenne. Finalement avec le recul, le choix d’une école comme Steiner était judicieux… Oui bien sûr, c’était un bon choix. Mais en tant que malentendant, cela a occasionné un effet pervers puis que je comptais trop sur les autres, au point d’en être un peu dépendant (rires). Que faites-vous à la fin de la scolarité obligatoire ? Je repars en France, à Annecy pour faire un apprentissage de charpentier, dans une école réputée, l’École des Compagnons. J’y ai obtenu deux CAP (certificats d’aptitude professionnelle, ndlr), l’un de charpentier, l’autre en construction du bois. Pourquoi avoir choisi la profession de charpentier ? Parce que le bois était une vraie passion pour moi et déjà à l’école j’adorais ce que l’on faisait en ébénisterie. C’est une vocation qui remonte à loin : j’avais 10-11 ans quand mes parents ont fait construire leur maison, entièrement en bois, et je faisais parfois semblant d’être malade juste pour pouvoir rester voir les ouvriers travailler (rires). En plus, j’adorais passer des heures à bricoler dans l’atelier de la maison. Comment s’est déroulé votre apprentissage ? Côté enseignants, c’était très bien. Mais malheureusement, beaucoup de jeunes apprentis n’avaient pas vraiment envie de travailler. Alors sur 20 en classe, nous n’avons été que 6 à décrocher notre diplôme… Votre audition ne vous a pas compliqué la tâche ? En classe pas du tout, en revanche sur un chantier, ce n’était pas et ce n’est d’ailleurs toujours pas facile d’être sur un toit quand quelqu’un vous appelle… Mais j’ai la chance d’être dans une entreprise où mes collègues savent que je suis malentendant et font des efforts. Que faites-vous une fois vos diplômes décrochés ? Je pars avec mon meilleur ami en Australie pour 8 mois !  Après un premier mois de road trip entre Sydney et Cairns, on a ensuite trouvé un petit job dans une culture de bananes. C’était parfait pour apprendre l’anglais ! Et aujourd’hui, vous travaillez… Dès mon retour d’Australie, j’ai en effet cherché du travail, en particulier à Lausanne où mon père vivait et vit encore. Après quelques expériences d’intérim, certaines très positives d’autres moins, j’ai fini par trouver un travail fixe, même si la période du covid n’a pas toujours été facile. Vous aimez ce que vous faites ? Oui bien sûr, même si personnellement j’aimerais surtout faire de la charpente, alors qu’il nous arrive souvent de faire de la construction en bois. Mais c’est comme ça, c’est le métier. Cela dit, je sais que je ne ferai pas ce métier toute ma vie : j’ai déjà 10 ans de travail derrière moi et on en sent le poids physique, en termes de fatigue, mais aussi d’impact sur le dos. Les journées sont exténuantes et la concentration liée à la perte auditive y ajoute encore. Si vous quittez le métier, que pourriez-vous faire dans ce cas ? Aucune idée pour l’instant ! Mes parents m’ont toujours dit que j’ai un don pour transmettre, et c’est vrai que j’adore ça. Alors pourquoi pas devenir un jour enseignant en apprentissage ?
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