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Breno Rodrigues Lange: «Mes implants ne m’empêchent de jouer au basket-ball!»
Né à Morges d’une maman brésilienne et d’un papa allemand, Breno Rodrigues Lange est double implanté cochléaire. Ce qui n’empêche pas ce jeune homme de 16 ans, trilingue, de s’adonner avec passion à son sport préféré au sein du Cossonay Basket Club.
Depuis quand êtes-vous sourd ou malentendant ?
En réalité, les tests l’ont montré dès ma naissance et l’ont confirmé trois mois plus tard. A ce moment-là, j’ai été adressé au CHUV et de nouveaux examens ont montré que j’étais sourd à 97% des deux oreilles.
Quelle est la cause de cette surdité ?
On n’en sait rien ! Ma maman a eu une grossesse normale et tout s’était très bien passé. Je n’ai en outre aucun cas de surdité dans ma famille.
Vous avez donc été appareillé ?
Non, j’ai directement été implanté à l’âge d’un an à Genève, aux HUG. J’ai d’ailleurs été un des tout premiers à faire l’objet d’une double implantation simultanée !
Du coup, comment s’est déroulée votre scolarité avec cette perte auditive ?
Mais très bien ! Comme beaucoup d’enfants, j’ai subi du harcèlement scolaire, mais pas du tout en lien avec ma surdité, pour laquelle j’ai toujours été respecté. Durant mes premières années, j’ai été scolarisé à l’Ecole cantonale pour enfants sourds (ECES) avant de passer à l’école obligatoire normale car tout se passait très bien puisque je parlais déjà 3 langues : le français, le portugais et l’allemand. Les enseignants ont surtout ensuite veillé à ce que je sois placé au 1erou au 2ème rang…
A vous entendre, tout à l’air facile !
Non bien sûr. D’abord, j’ai la chance d’avoir eu le soutien de ma famille qui m’a toujours accompagné dans tout ce que je faisais que ce soit à l’école ou dans mes loisirs. Ensuite, c’est évident que quand on est sourd ou malentendant, il faut toujours faire bien plus d’efforts que les autres, surtout dans des matières il y a beaucoup d'oral comme l'histoire par exemple. Alors c’est vrai, à la fin d’une journée, on est vraiment fatigué (rires)!
Ce qui ne vous a pas empêché de réussir votre scolarité !
Oui, aussi parce que j’ai la chance d’avoir toujours eu beaucoup de facilité dans les matières scientifiques, et c’est là que j’ai obtenu beaucoup de points. D’ailleurs, je suis aujourd’hui en première année de gymnase pour obtenir une maturité maths-physique.
Et qu’aimeriez-vous suivre comme études plus tard ?
Plusieurs domaines m’intéressent, mais depuis que j’ai découvert, il n’y a pas très longtemps, le 747, cet avion extraordinaire, je me passionne pour l’aviation et l’aérospatiale ! Au début, j'ai envisagé de devenir pilote, mais la surdité occasionne beaucoup de désavantages. Alors désormais, je pense plutôt devenir ingénieur ou une profession proche.
Apparemment le basket-ball est votre autre passion !
Eh oui, et c’est aussi une passion récente ! Au départ, j’ai essayé le football, mais je n’ai pas beaucoup aimé. Et puis, il y a un an environ, mon père m’a acheté un ballon de basket en me disant : « essaye !». Et là, tout a décollé ! Cet été, j’ai même été bénévole pendant la Coupe du monde de basket des moins de 19 ans qui s’est déroulée à la Vaudoise aréna. Et puis surtout, je m’entraîne désormais au Cossonay Basket club dont je suis membre.
Et cela se passe bien, malgré vos implants ?
Mais oui, même si je suis le seul sourd du club, je communique avec mes coéquipiers et j’entends très bien les consignes avec mes implants. Tout se passe donc très bien !
Garder les implants pour jouer au basket, ce n’est pas risqué ?
Pas du tout (rires) ! J’ai bien moins d'accidents avec mes implants dans le club que quand je fais du sport ou des activités à l'école ! Pour une raison simple : au club, c’est physique c’est vrai, mais tout le monde sait jouer et la tête n’est quasiment jamais sollicitée !
Il est aussi question que vous participiez aux Deaflympics (Jeux olympiques pour les sourds, ndlr) ?
Oui effectivement, c’est un projet qui me plairait beaucoup. Mais le problème, c’est que l’on manque de joueurs et il n’est donc pas sûr que l’on puisse constituer une équipe. Nous verrons bien !
Et finalement, où vous voyez-vous dans 20 ans ?
C'est une question compliquée (rires). Mais j'espère bien que je réussirai à faire le métier que je veux, c'est-à-dire ingénieur dans l'aviation ou l'aérospatiale. L’autre option qui serait aussi géniale, ce serait de faire une énorme carrière dans le basket, parce que c'est vraiment mon sport préféré !
Les jeunes ont la parole
10 novembre 2025
Publié le :

Un complément alimentaire pour soigner les troubles auditifs?
Les autorités américaines viennent de délivrer un brevet au complément alimentaire ACEMg dans le cadre d’une «préservation ou amélioration de l’audition en cas de perte auditive neurosensorielle».
Il y un nom un peu étrange, mais qui pourrait être appelé à une vraie célébrité. Élaboré par la société américaine Soundbites PBC après de nombreuses années de recherche, le complément alimentaire ACEMg® est un antioxydant à base de vitamines A, C, E, ainsi que de magnésium minéral.
Intitulée « Le complément alimentaire ACEMg modifie la progression de la surdité héréditaire », une première étude datant de 2016 et publiée dans la prestigieuse revue Nature, a cherché à évoluer le potentiel de traitement de l'ACEMg sur la cochlée et l'audition de modèles de souris pour deux mutations humaines: la GJB2, principale cause de surdité infantile, et la DIAPHIE3, une cause de neuropathie auditive. Avec un premier résultat encourageant : les seuils auditifs mesurés par la réponse auditive du tronc cérébral étaient significativement meilleurs pour les souris Gjb2-CKO nourries par l'ACEMg que pour le groupe de régime témoin.
Depuis, d’autres études appliquées aux humains, ont confirmé élargi le spectre d’utilisation de l’ACEMg: ainsi, une prise quotidienne de ce complément durant au moins 16 semaines améliorerait les seuils auditifs mesurés par distorsion-produit otoacoustique d’au moins 15% et ce, dans des fréquences allant de 1 à 10kHz.
Bénéfice clinique évident
« Même s’il ne faut pas en surestimer l’effet, l’usage de l'ACEMg s’est soldé par un bénéficie clinique évident et important pour les patients », explique le Dr. Glenn Green, de l’institut de recherche Kresge à l’université du Michigan.
A l’aune de ces résultats, et c’est une première, l’Office des brevets et des marques des États-Unis (USPTO) vient très officiellement de délivrer un brevet au complément nutraceutique ACEMg, dans le cadre explicite d’une « préservation ou amélioration de l’audition en cas de perte auditive neurosensorielle non liée à une infection virale ».
«Ce nouveau brevet est plus qu'une étape juridique, c'est un grand pas en avant pour la santé auditive et qui consacre plus de deux décennies de recherches », se réjouit Barry Seifer, fondateur et PDG de la société Soundbites PBC.
Et les perspectives s’annoncent encore plus prometteuses pour l ACEMg, disponible en libre accès aux États-Unis depuis de nombreuses années sous forme de capsules: d’autres études sont actuellement en cours pour en évaluer son potentiel dans la prise en charge des symptômes de l’acouphène, de l’hyperacousie et de la sensibilité auditive, ainsi que sur la réduction du risque de démence chez les patients atteints de troubles auditifs.
Actualités
3 novembre 2025
Publié le :

«Les personnes sourdes ou malentendantes doivent créer elles-mêmes leurs propres solutions!»
Première avocate sourde de naissance en France, conférencière à l'international, écrivaine, animatrice TV et coach certifiée, Virginie Delalande vient de publier un passionnant guide de développement personnel intitulé « Kiffe ton handicap ». Rencontre avec une personnalité solaire qui a su faire une force de sa surdité.
Quelle est la cause de votre surdité ?
Je suis née sourde, avec une surdité d'origine génétique. Mes parents s’en sont rendu compte très vite mais le médecin leur a dit : « Vous vous inquiétez pour rien, tout va bien!». Sauf qu'à l’âge de 9 mois, je n’ai pas été capable d'entendre des chiens qui a aboyaient devant un immense tracteur qui fonçait dans la rue. Évidemment là, le diagnostic a été posé (grand sourire)…
Ce qui n’a pas empêché le spécialiste de décréter une véritable « condamnation » à votre égard…
Ah mais totalement, il a déclaré à mes parents : « Elle ne parlera jamais ! », comme si mon histoire était écrite d'avance ! Mes parents ont été effondrés d'apprendre que j'étais sourde, effondrés de savoir qu’ils ne m’entendraient jamais dire « papa » ou « maman » et effondrés de savoir que je ne mènerais pas une vie normale…
Terrible, ce genre de condamnation, non?
Eh oui ! Et cela arrive encore aujourd’hui : pas plus tard qu'il y a 2 semaines, mon chauffeur de taxi m'a dit qu'il avait eu la même réaction d'un médecin à propos de son fils sourd. Et cela se passe encore au 21e siècle, alors qu'avec une bonne prise en charge et un bon environnement, on arrive à parler et à très bien évoluer dans la vie.
La société vous a-t-elle soutenue ?
Certainement pas ! La société a toujours été du genre à me mettre des boulets aux pieds ! Si j’en suis là aujourd’hui, c'est grâce à mes parents et aux logopédistes qui m’ont énormément fait travailler !
Qu'est-ce qui est le plus difficile, quand on est un enfant sourd ?
Les adultes et les adolescents ! Les enfants, c'est facile car ils n'ont pas de préjugés. Mais quand il s'agit d’établir de vrais échanges et de partager des choses et des connaissances avec les plus grands, cela devient beaucoup plus compliqué, car rien n'est adapté pour les personnes en situation de handicap auditif qui portent seules la charge de la communication, de la compréhension et de l'adaptation.
Vous avez été la première avocate sourde de France, avant de vous tourner vers le marketing, puis le coaching… Comment expliquez-vous ce parcours ?
Ce n’est que l'année dernière que je me suis rendu compte que le point commun de tous les métiers que j'ai exercés, c'est la communication… Peut-être y a-t-il là quelque chose de psychologique en lien avec ma volonté de relever les défis liés à mon handicap (rires).
Votre livre opère un changement de perspective. Avec vous, le handicap en général et la surdité en particulier, se transforment en grande chance…
Le handicap nous fait découvrir des facettes de nos personnalités que nous ne savions pas avoir. Grâce à la surdité, j’ai pu développer énormément d'outils que j'ai pu mettre à profit dans ma vie personnelle et professionnelle : prendre ma place, apprendre à négocier, être attentive à la qualité de la communication, être assertive, apprendre à sortir du cadre etc…
En même temps, tout n’a pas été rose…
Certainement pas. Être en situation de handicap, ce n’est pas facile et si on s’en sort, c’est par instinct de survie, parce que cela devient une nécessité après avoir touché le fond. Mais une fois que le plus dur est fait, on se rend compte à quel point le handicap est vraiment un cadeau !
Quand avez-vous eu le déclic pour arriver à ce changement de perspective ?
Je n’ai pas eu de déclic à proprement parler, mais plutôt un lent processus de prise de conscience, pendant la période de reconstruction que j'ai traversée grâce à une thérapeute, suisse d'ailleurs, qui était géniale. Elle m'a permis de prendre conscience de plein de choses que j'ai appliquées dans ma vie et qui m’ont aidée à me construire enfin une vie qui me ressemble.
Venons-en à votre livre, très joliment intitulé « Kiffe ton handicap ! ». Pourquoi ce guide de développement personnel qui ,en passant, fourmille d’outils très utiles?
Parce que c'est le livre que j'aurais rêvé de lire au moment de mon adolescence et au début de ma vie d'adulte, quand je me posais plein de questions et que j'étais pleine d'inquiétude ! Ce livre a pour objectif de faire gagner du temps à tous ceux qui se sentent mal avec un handicap, qui en ont honte, qui se dévalorisent se disent : « je n'y arriverai pas !».
Un des concepts que vous élaborez, c’est celui de normalitude…
On renvoie toujours aux personnes en situation de handicap, l'image qu’elles doivent être réparées, qu’il leur manque quelque chose etc. En réponse, les personnes sourdes essayent de se conformer à une certaine idée de la normalité, ce qui des oblige à se sur-adapter au point d'en perdre leur identité, leur énergie et même parfois de finir en burn-out… C’est ça, la normalitude, à laquelle je préfère opposer le néologisme de handicapitude, qui implique de rester nous-mêmes avec notre singularité !
Pour vous, les personnes en situation de handicap ne sont pas de « erreurs du système » mais des « éclaireurs ». Vraiment ?
Mais oui, car nous sommes la démonstration vivante que nous pouvons dépasser les limites du corps humain : après tout, des sourds arrivent bel et bien à parler sans entendre, ce qui montre à quel point nous faisons voler en éclats les certitudes de la science. Et puis, ne sommes-nous pas un exemple pour les personnes qui vieillissent et à qui on montre que l'on peut garder de l'autonomie malgré les pertes ? Nous montrons que l'on arrive toujours à avancer, car nous sommes résilients et que l'on sait ce que c'est que de sortir de la tempête. Je suis convaincue qu’avoir plus de personnes en situation de handicap dans le monde des dirigeants politiques leur permettrait d'avoir plus de recul et d'être de vrais leaders !
« Kiffe ton handicap ! » n’est pas seulement un livre. Il se veut le point de départ d’un véritable mouvement de fond dans la société. Qu’en attendez-vous ?
La libération psychologique des personnes en situation de handicap ! Car j'en ai assez que l'on se cache, qu'on ait honte alors que l'on a tant à apporter à la société. Toutes les minorités ont plus ou moins fait leur révolution mais pas les personnes en situation de handicap. Nous devons désormais décider de notre vie, ne pas laisser faire ceux qui pensent pour nous et créer nos propres solutions.
Comment cela va-t-il se passer concrètement ?
Très rapidement une newsletter va arriver. Puis des rencontres, des formations et des séminaires seront organisés dans le but de donner aux personnes en situation de handicap des outils capables de leur permettre de s'affirmer et de mener leur vie.
« Kiffe ton handicap ! Ta différence est ton histoire. Fais-en ton pouvoir! » Virginie Delalande, éditions Dunod, 2025.
En savoir plus sur le mouvement « Kiffe ton handicap » : www.kiffetonhandicap.com
Point fort
27 octobre 2025
Publié le :






