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Pas de statistiques officielles sur la malentendance en Suisse

4 novembre 2019
Publié le :
Alors que l’Organisation Mondiale de la Santé est à même d’avancer des chiffres sur les conséquences sociales et économiques de la déficience auditive à travers le monde, la Suisse reste muette.
Si l’Organisation Mondiale de la Santé annonce des chiffres sur la non prise en charge de la déficience auditive dans le monde, l’Office fédéral de la santé publique, OFSP, en est incapable. En réponse à notre demande, voici ce qu’il répond : « nous n’avons pas de données concernant les problèmes d’audition. Peut-être l’Office fédéral de la statistique pourra-il vous aider, ou alors une association faîtière ou une société médicale ».
La centrale des Statistiques indique quant à elle : « nous regrettons de ne pouvoir donner suite à votre demande sans lien avec notre domaine de compétence, respectivement la statistique suisse. Nous publions des chiffres concernant l’absence des salariés au travail. L’office fédéral de la santé publique publie des chiffres concernant la perte de productivité de quelques maladies, par exemple l’alcoolisme.
Peut-être l’OFSP peut vous renseigner sur la provenance de ces chiffres »… Retour à la case départ.
Pour la porte-parole de la Fédération Suisse des Sourds SGB-FSS, Sandrine Burger : « cela nous serait fort utile pour notre combat politique, mais nous ne les possédons pas. C'est le gros problème de la Confédération, qui possède des statistiques sur le handicap en général, mais pas de détails sur les différents handicaps ! ».
« Il existe en effet une lacune à ce sujet. En cause, un manque d’intérêt au niveau politique, car des sujets plus importants prennent le devant des préoccupations, et une banalisation de ce handicap de la part de la société », précise le président du groupement vaudois des ORL, le docteur Arido Agrifoglio.
Et d’ajouter : « Il reste encore une part de mysticisme autour de la malentendance et vis-à-vis de l'appareillage. Il ne devrait plus exister des cas de personnes se sentant à l’écart au fond d’une salle ou lors d'une réunion. Je précise tout de même que de nombreuses personnes atteintes de perte d’audition tardent parfois avant de réagir et de venir nous consulter. La perte des aigus est progressive et sournoise, car les graves se maintiennent ; du coup les gens se persuadent qu’ils entendent bien et refusent d'admettre ce handicap. Seuls 20 % de ces personnes se déclarent malentendantes ».
Selon une étude d’« EuroTrack » et suite à un sondage dans divers pays d’Europe et en Suisse, 7,7 % de la population tous âges confondus présentent une déficience auditive de plus de 40 dB. 20 % des 65-74 ans souffrent d’une surdité auto-déclarée, 35 % des plus de 75 ans et 80 % des plus de 80 ans. L’étude précise que 50 % portent un appareil auditif.
« La défiance envers l'appareillage reste importante. Il est nécessaire d'informer plus, d'appareiller plus rapidement en encourageant les personnes malentendantes, car un système auditif n'est pas simple à porter au début. Il faut compter jusqu'à trois mois pour que la personne s'y habitue », poursuit le docteur Arido Agrifoglio.
Reste le problème des coûts qu’on connaît bien. « Les appareils coûtent particulièrement chers en Suisse par rapport aux pays voisins, à qualité égale. Ils sont partiellement remboursés. Ceci peut être un frein à leur acquisition. Hormis relever ce problème, de le faire reconnaître par des communications explicites et soutenues, il est bien difficile de modifier les choses dans la situation actuelle des coûts de la santé. Peut-être les associations de malentendants pourraient faire plus de bruit… », poursuit-il.
Bien maigres résultats pour une Suisse, dont les conditions de base de l’intégration stipule : « l'intégration est liée aux droits fondamentaux. Elle suppose l'égalité des chances. Il s'agit de permettre à chacun d'avoir part aux ressources de la collectivité, de participer à la vie de la société et de développer ses propres potentialités, d'où l'importance des conditions structurelles de l'intégration, comme l'accès à l'éducation, à la formation de base et continue, au marché du travail, notamment », conclut-il.
Du côté de l’OMS (Sources Audition Conseil)
L’Organisation Mondiale de la Santé vient d’annoncer, elle, que la déficience auditive non prise en charge coûte cher à l’économie mondiale, soit 750 milliards de dollars en 2016, et qu’elle génère l’isolement social et des difficultés de communication à hauteur de 573 milliards de dollars. En France, plus de 2 milliards d’euros et des conséquences sociales d’une déficience auditive importante non compensée, qui représentent à elles seules les deux tiers du coût mondial.
La baisse de productivité due au chômage et aux départs en retraite prématurés coûte 105 milliards de dollars. Toujours en France, un tiers des personnes actives et malentendantes souffrent psychologiquement. Les dépenses de santé liées à l’absence de prise en charge reviennent à 67, voire 107 milliards de dollars de coûts.
Dans l’Hexagone, plus de 200 millions d’euros pourraient être économisés sur six ans.
Les personnes qui entendent mal ont des dépenses de santé plus élevées que les autres. Les élèves malentendants ou sourds peuvent être scolarisés en milieu ordinaire, à l’école, au collège ou au lycée le plus proche de leur domicile, avec des enseignants parlant comme eux la langue des signes française ou la langue parlée complétée (LPC). Un dispositif d’accompagnement est également prévu pour ceux qui ont des difficultés d’apprentissage, mais qui ne pratiquent pas ces langues.
Le coût de la déficience auditive non prise en charge est estimé à 20 milliards d’euros. En comparaison, les dépenses d’audioprothèses présentées au remboursement de l’Assurance maladie se sont élevées à près d’un milliard d’euros, en 2015. L’acquisition d’aides auditives a représenté 93 % de cette somme, les frais d’entretien et de réparation les 7 % restants. Seulement 134 millions d’euros ont été pris en charge par le régime obligatoire.
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