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« Ce qui ne tue pas rend plus fort » !

5 septembre 2018
Publié le :
Dissimuler sa malentendance durant les vingt premières années de sa vie en affrontant les épreuves et les études : tel est le vécu d’une jeune femme qui témoigne à travers ces lignes.
Malentendante de naissance, * Mathilde est diagnostiquée alors qu’elle entame l’école primaire ; les appareils prescrits finissent dans la poche de la fillette qui les enlève dès qu’elle quitte la maison. « Je n’étais pas dans le déni, j’étais consciente que j’entendais mal, mais j’avais trop peur du jugement. J’ai préféré jouer à cache-cache avec mon entourage, surtout mes camarades, en redoublant d’efforts pour faire semblant de vivre dans la normalité. J’essayais simplement de sortir la tête de l’eau pour être à niveau ».
Assise au premier rang en classe, Mathilde bûche sans cesse avec discipline, étudie beaucoup à la maison et apprend le contenu des cours par cœur. S’ensuit un apprentissage dans le domaine de la vente avec obtention du CFC, ainsi qu’un diplôme de secrétaire médicale lors d’une seconde formation. A la suite de ce diplôme, elle s’est reconvertie professionnellement et a poursuivi ses études en obtenant un CFC d’employée de commerce. « Privée d’assistance, sans compter les conséquences qui s’enchainaient, j’ai emprunté cette route par défi, dissimulant ma déficience auditive.
On disait de moi que j’étais dans la lune, moi, j’étais dans ma bulle. Je me suis malgré tout retrouvée dans le rôle de souffre-douleur, mais ce qui ne tue pas rend plus fort ». Quand on prend des coups, tout s’écroule et on doit repartir au point de départ en se forgeant une carapace, alors qu’épaulée par un entourage positif, on est naturellement porté vers le haut.
Dotée d’un caractère affirmé, la jeune fille solitaire ne se laissait pas démonter. « Lorsque j’avais envie de pratiquer un loisir, j’y allais seule. J’ai fini par apprécier ce retranchement sur moi-même ». Cette étape de vie lui a permis de devenir très indépendante.
Le déclic
Au fil des années, la perte auditive de Mathilde s’est naturellement dégradée. Son petit ami bienveillant de l’époque l’a aidée à assumer son handicap. A vingt ans, elle a travaillé dans un office AI, où elle a vu passer des cas plus lourds que le sien.
Une collègue malentendante et d’autres compréhensives lui ont donné le courage d’entamer les démarches pour accepter d’en parler et de porter des intra-auriculaires. Il lui a fallu vingt années avant de pouvoir vivre normalement. L’entrée dans l’âge adulte a été particulièrement pénible, car la fragilité de l’adolescence est encore présente, alors que l’entourage attend qu’on se comporte comme tel.
Lorsqu’elle a entendu le chant des oiseaux pour la première fois, elle s’est alors demandé comment elle avait pu vivre sans si longtemps. Et de préciser : « Aujourd’hui, j’annonce d’entrée mon handicap, ça m’apprend à regarder les gens dans les yeux. Mais le fait de porter des appareils leur laissent croire que j’entends aussi bien qu’eux ; c’est faux ! Heureusement que j’ai le contact aisé, c’est moi qui réalise le 90% des efforts.
Si la technologie est plus développée pour les appareils auditifs ou les implants cochléaires, les intra-auriculaires sont un peu moins performants, ils ne peuvent par exemple pas tous être connectés à un téléphone portable.
Présente lors de la Journée à thème initiée par la Fondation forom écoute en juin dernier, Mathilde est venue témoigner de son cas de rigueur accepté à l’époque par un Office de Assurance Invalidité romand, qui a participé aux frais des appareillages. « On m’a certifié que j’avais passé entre les gouttes ».
Aller de l’avant
Depuis un an et demi, la jeune femme, sportive à ses heures, travaille au sein d’une association pour personnes handicapées dans le Nord Vaudois, où elle se sent très à l’aise. « J’ai auparavant également vécu des expériences négatives dans le cadre professionnel, voire du mobbing ».
Aujourd’hui âgée de trente-deux ans, cette fonceuse poursuit sa route avec courage en se fixant toujours un objectif à atteindre. A cet effet, elle démarre une formation d’assistante RH tout prochainement.
« L’objectif de ce témoignage est d’aider les malentendants en leur signifiant que lorsqu’on a de la peine à assumer, il faut laisser le temps au temps et évoluer par étapes. Chacun ressent individuellement la normalité. Il faut apprendre à accepter les choses et être en accord avec soi ». Mais la peur d’entendre moins avec le temps et l’usure normale lui rappelle qu’elle doit se battre au quotidien.
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